vendredi 12 août 2016

Quand la nuit devient jour

J'ai lu par hasard les premières pages de ce livre gratuitement en ligne. J'ai tellement été scotchée que dès la fin du passage atteinte, je n'avais plus qu'une idée en tête, me procurer ce livre au plus vite! C'est chose faite, et je n'en ressors pas indemne...

On m’a demandé un jour de définir ma douleur. Je sais dire ce que je ressens lorsque je m’enfonce une épine dans le pied, décrire l’échauffement d’une brûlure, parler des nœuds dans mon estomac quand j’ai trop mangé, de l’élancement lancinant d’une carie, mais je suis incapable d’expliquer ce qui me ronge de l’intérieur et qui me fait mal au-delà de toute souffrance que je connais déjà.
La dépression. Ma faiblesse.
Le combat que je mène contre moi-même est sans fin, et personne n’est en mesure de m’aider. Dieu, la science, la médecine, même l’amour des miens a échoué. Ils m’ont perdue. Sans doute depuis le début.
J’ai vingt-neuf ans, je m’appelle Camille, je suis franco-belge, et je vais mourir dans trois mois.
Le 6 avril 2016.
Par euthanasie volontaire assistée.

Que dire de ce livre qui n'a pas déjà été dit? C'est un récit coup de poing, très fort mais aussi très beau. J'avoue l'avoir terminé en larmes, touchée par l'histoire de Camille et des siens et par cette difficulté qu'a la jeune femme à vivre dans un corps qu'elle n'accepte pas et qui la fait tant souffrir et qu'elle martyrise à son tour, dans un ballet incessant.

Plus d'une fois, j'ai eu le souffle coupé devant la violence des réactions du corps de Camille, devant les douleurs qu'elle subit, mais aussi devant celles qu'elle s'inflige. Elle oscille entre boulimie et anorexie, ne se sentant jamais dans la norme qu'elle soit grosse ou mince (voire même maigre), tombe dans tous les excès sans jamais se sentir "normale", jolie et désirable.
Ajoutez à cela des petits amis pas franchement francs et honnêtes, et vous comprendrez que la pauvre Camille n'a pas vraiment eu de chance dans ses relations amoureuses, et qu'elle ait du mal à se sentir bien dans sa peau.

Rébellion du corps, rébellion du cœur, souffrance, font que Camille n'en peut plus, et puisque rien ne peut alléger son mal-être et que ni médecins ni psychologues ne réussissent à apaiser ses souffrances, elle se tourne alors vers l'euthanasie volontaire assistée.  
Sa demande acceptée, Camille va passer ses dernières semaines de vie dans une clinique privée, où personne ne sait vraiment pourquoi elle est là. Mais là-bas, elle va rencontrer un psy pas comme les autres, aux méthodes bien différentes, qui va bouleverser ses certitudes. Pourra-t-il lui redonner goût à la vie avant qu'il ne soit trop tard? Réussira-t-il là où tous les autres, médecins comme famille, ont échoué?

La famille, justement, est dévastée par le choix de Camille: ses parents se demandent ce qu'ils ont bien pu rater dans son éducation pour qu'elle choisisse de mourir, quand tant d'autres sont condamnés et aimeraient justement vivre.
Je ne juge pas les décisions de Camille, limite je peux comprendre qu'à force de souffrir elle ait envie de baisser les bras et de tout plaquer, mais je trouve ça dommage qu'elle n'ait plus envie de se battre, de s'offrir une dernière chance... 

Il n'en reste pas moins que c'est une histoire forte, un récit poignant qui ne peut pas laisser indifférent et dont la fin risque fort de vous faire hurler de frustration (ce qui a été mon cas).
Au début, j'en ai voulu à Sophie Jomain, je la trouvais cruelle d'avoir écrit cette fin, avant de comprendre qu'elle nous offre ainsi la possibilité d'imaginer la suite et de choisir ce qui nous convient le mieux. Je n'aime pas les fins ouvertes, mais ici je suis bien obligée d'admettre que c'est le meilleur choix que l'auteur pouvait faire, car si elle avait tranché net il y avait de fortes chances pour que les lecteurs lui en veuillent de ce choix ou d'un autre (ceux qui ont lu le livre comprendront).

Bref, j'ai dévoré ce livre, et même si je n'ai pas toujours été d'accord avec les choix de l'héroïne, même si je ne me suis pas vraiment attachée à elle car je n'ai absolument pas pu m'identifier à elle (malgré quelques passages qui ont eu une résonance particulière, difficile de s'identifier à un personnage en telle souffrance), je reconnais que son histoire est touchante et qu'elle devrait parler à beaucoup de gens. 
On a tous droit à une mort digne, et même si le sujet est difficile à aborder, je trouve que Sophie Jomain le fait avec une grande sobriété et beaucoup de délicatesse. A lire, donc!

coup de cœur!

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4 commentaires:

  1. Eh bien ! Il t'as vraiment convaincu ! Je n'ai jamais lu de livre de cette auteur mais on entend que du bien d'elle, donc il faudrait que je m'y mette ! ��

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  2. Je ne pensais pas le lire avant plusieurs années et puis, au fil des avis, j'ai fini par craquer et je me le suis acheté. J'ai déjà un roman ayant comme thème l'euthanasie et cela avait été un coup de coeur : Je vous demande le droit de mourir ! Du coup, je pense que celui-ci pourrait également me bouleverser.

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